Les appartements de Zélamir de Noailhac, Duc de Boissezon

Zélamir de Noailhac et ses deux valets prirent possession des lieux. Les chandelles retrouvèrent leur flamme, les comodes se remplirent, les lits se drapèrent, et la vie reprit ses droits.

"Charmant endroit... Quelques tableaux et tapisserie à remplacer, et je serais chez moi... Mais nous verrons cela plus tard..."

Aprés le rude voyage que les trois hommes avaient effectué depuis Boissezon dans la campagne languedocienne, la fatigue et les contusions poussérent tout ce beau monde à rejoindre les bras de Morphée, Dieu des rêves.

Le repos fut de courte durée car l'agitation et le bruit entrainés par la préparation du bal amaigrirent fortement la matinée qui se voulait grasse. Zélamir mit un soin particulier à se maquiller, à se vêtir et s'appréter à la mode parisienne. Tandis qu'à ses côtés, Joshua et Jean-Désiré, ses deux valets, s'appliquaient à défaire les grosses malles du jeune Duc. Ce dernier se planta devant une fenêtre qui donnait sur les jardins du château.

Zélamir, né en pleine campagne, dans les causses du Languedoc, vouait une folle admiration à Mère Nature. Il adorait sentir sous ses pieds l'herbe fraîche encore couverte de rosée, il aimait plonger son nez dans une rose ou une tulipe, et il raffolait dormir adosser à un vieux chêne centenaire. Aussi la vue des jardins lui firent apparaitre un large sourire.

"Messieurs, je m'en vais de ce pas humer l'air frais de ces beaux jardins. Faites en sorte que tout soit rangé à mon retour, je vous prie.
Et Jean-Désiré, prépare donc ma plus belle tenue pour la sauterie de ce soir. Je veux briller..."

Sur ces mots sollennellement déclamés, Zélamir sortit de ses appartements afin de rallier les jardins du château, non sans une certaine excitation.

( la chambre de Saint-Aignan ----> )

En passant dans les couloirs, l'air flaneur, Chastignac croisa un beau jeune homme bien pomponné qui apparaissait l'air jovial. Les yeux brillants comme ceux d'un enfant qui découvre un nouvel environnement, ce jeune noble n'avait jamais été vu de Chastignac. Celui-ci s'inclina donc, reconnaissant un connaisseur dans l'art de se vêtir, supposant quelques biens et richesses.

-Monsieur...

Chastignac venait de se faire jeter de la chambre de Saint-Aignan, et était restée sur sa faim quant à rencontrer du monde. Croiser ce jeune seigneur était donc une heureuse haubaine pour lui.

Zélamir ne cacha pas sa joie d'être abordé par un homme d'importance. Car même s'il ne le connaissait ni d'Eve, ni d'Adam, il sentait parfaitement, ne serait-ce qu'à la tenue, au comportement ou à la prononciation, que son interlocuteur n'était pas n'importe qui.
Aussi, le Duc de Boissezon se laissa aller à une petite courbette, joliment exécutée soit dit en passant. Puis, avec un léger accent chantant, il se présenta :

"Bonjour Monsieur... Zélamir de Noailhac, Duc de Boissezon... Mon visage, comme mon nom d'ailleurs, vous sont trés certainement inconnus. Et pour cause, je ne suis à Fontainebleau que depuis quelques heures.
Aussi, je suis bien aise de rencontrer quelqu'un dont la prestance et l'habillement me laisse penser qu'il appartient à quelque grande famille... Les impressions m'induiraient-en en erreur, Monsieur...?"

Le Duc de Boissezon accompagna sa question d'un large sourire.

*Oh, mais quel charmeur! Cet homme serait presque digne de mon cher Saint-Aignan.... en plus jeune*

Adrien sourit a cette pensée, il aimait beaucoup, en cet instant précis, se railler de son ami. Pourtant Chastignac se ressaisit vite, que le duc ne prenne pas ce sourire pour lui.
En effet, ces manieres, courbettes, politesses et attentions de courtisans, qui éfféminaient presque, plaisaient beaucoup à Chastignac, lui montrant qu'il avait affaire a un connaisseur en matiere de cour.

Bien sûr, le jeune duc ignorait totalement qu'il avait été chasser par son pere, et par delà, Chastignac ne pouvait lui en tenir rigueur quant à la mention de sa grande famille. Oui, si Saint-Aignan avait parlé ainsi, Chastignac se serait échauffé, mais justement, tout ce qu'il ne ferait pas avec Saint-Aignan lui plaisait soudain.

Adrien était donc dans un beau jour.

-Comte de Chastignac, monsieur le duc. Quant à ma famille, elle doit vous être totalement inconnue, a moins que vous ayez déjà entendu parler de Castelguard à Boissezon.

Chastignac laissa passer une courte pause, durant laquelle il pu observer a loisir son interlocuteur. S'il disait vrai et qu'il était nouveau a Fontainebleau, il n'empechait qu'il s'habillait bien a la derniere mode d'ici. Chastignac sourit. Au moins n'aurait-il pas à subir les railleries désobligeante des dames coquettes, dont lui-même avait eut droit à son arrivée de sa petite province.

-Vous arrivez donc tout juste a Fontainebleau vous dites ? C'est heureux. Vous verrez, cet endroit est superbe. Je puis peut-être vous aider, vous faire visiter....

Il accompagna ces paroles d'un geste courteois de la main.

-Mais ne me laissez pas continuer si vous connaissez déjà l'endroit, j'en mourrais de honte.

Adrien laissa entrevoir ses dents dans un charmant sourire, preuve qu'il ne prenait pas réellement ses propres paroles au sérieux, et tournait sa petite phrases à la dérision.

Adrien de Chastignac a écrit:

-Comte de Chastignac, monsieur le duc. Quant à ma famille, elle doit vous être totalement inconnue, a moins que vous ayez déjà entendu parler de Castelguard à Boissezon.

Zélamir fronça les sourcils dans une brève réflexion... Beaucoup de villes ou de villages commençaient par Castel- dans le Sud-Ouest, mais aucun Castelguard ne revint à sa mémoire.

"Je dois avouer que ce nom m'est complètement inconnu... Mais je dois également vous confesser que je souffre de certaines lacunes en Géographie... Ceci expliquerait peut-être cela..."

Citation :

-Vous arrivez donc tout juste a Fontainebleau vous dites ? C'est heureux. Vous verrez, cet endroit est superbe. Je puis peut-être vous aider, vous faire visiter....

Monsieur de Chastignac disait vrai, l'architecture était magnifique, la décoration de grand goût, et les jardins semblaient mirifiques.

"Rien ne me ferais plus plaisir, car je ne connais encore rien des lieux... Si ce n'est mes modestes appartements, et la cour où m'a déposé mon carosse cette nuit..."

Citation :

-Mais ne me laissez pas continuer si vous connaissez déjà l'endroit, j'en mourrais de honte.

Le Duc de Boissezon laissa échapper un petit rire, puis il hocha la tête pour confirmer qu'il ne connssait vraiment pas l'endroit.

"En dehors des campagnes de l'Albigeois et de notre bonne vieille ville de Toulouse, je n'ai guère voyager... Et c'est la première fois que je me trouve au dessus du Massif Central... Croyez-moi, ce château est une sombre inconnue.

Vous êtes à Fontaineblau depuis longtemps, Monsieur le Comte? En espèrant que ma question ne soit point trop indiscrète... "

Adrien de Chastignac avait éveillé bien des curiosités chez le Duc de Boissezon. Pourquoi était-il à Fontainebleau? Quel était exactement son rôle dans l'entourage du Roi? Il découvrirait peut-être tout cela avec le temps...

Citation :

"Je dois avouer que ce nom m'est complètement inconnu... Mais je dois également vous confesser que je souffre de certaines lacunes en Géographie... Ceci expliquerait peut-être cela..."

Un léger sourire se dessina sur les levres d'Adrien. Si le duc de Boissezon ne connaissait pas sa géographie, l'art oratoire ne lui était surement pas étranger.
C'était amusant, mais Chastignac imaginait Zelamir plus comme un dédaigneux lord anglais que comme un provincial du sud...

Citation :

"Rien ne me ferais plus plaisir, car je ne connais encore rien des lieux... Si ce n'est mes modestes appartements, et la cour où m'a déposé mon carosse cette nuit..."

-Et bien venez, nous passerons par la cour, de là vous verrez l'ensemble du chateau. Ensuite, je vous ferais voir n'importe quel lieux, a votre bon plaisir. Si ce n'est le cabinet du Roy.

Adrien présenta son bras à Zelamir, heureux d'avoir enfin une cocupation pour les quelques heures qui restaient. Il se sentait soudain plus à l'aise qu'avec Mlle Delphine, peut-être parce qu'il n'avait nullement l'intention d'amadouer le duc pour ensuite s'en servir comme propulseur à la cour.

Citation :

Vous êtes à Fontaineblau depuis longtemps, Monsieur le Comte? En espèrant que ma question ne soit point trop indiscrète... "

Adrien fit un signe négatif de la tête, montrant par là que la question ne l'offusquait en rien.

-Je ne suis à Fontainebleau que depuis quelques mois, mais j'ai eu le temps de me familiariser avec les lieux. Mais la cour de France, je la suis depuis bientot 4 ans maintenant.

(visite avec le duc de Boissezon)

Adrien de Chastignac a écrit:

-Et bien venez, nous passerons par la cour, de là vous verrez l'ensemble du chateau. Ensuite, je vous ferais voir n'importe quel lieux, a votre bon plaisir. Si ce n'est le cabinet du Roy.

Zélamir accueillit avec un large sourire le bras qui s'offrait à lui. Il y entremêla le sien, et les deux hommes commencérent à déambuler lentement dans le long couloir.

"Je ne sais comment vous remercier, pour votre extrême gentillesse et votre grande disponibilité. J'espère ne pas perturber outre-mesure votre emploi du temps, trés certainement surchargé? Si tel était le cas, ne soyez nullement géné pour moi, nous remettrions cette visite à plus tard... Vraiment, cela me génerait fortement d'interférer dans vos projets, Monsieur le Comte..."

Citation :

-Je ne suis à Fontainebleau que depuis quelques mois, mais j'ai eu le temps de me familiariser avec les lieux. Mais la cour de France, je la suis depuis bientot 4 ans maintenant.

Zélamir de Noailhac écoutait avec grand intérêt les dires de son guide. Quel chance avait-il eu de croiser une âme si charitable ce matin. Une âme qui semblait parfaitement connaître la cour qui plus est.

"Diantre, quatre ans... Et bien, vous devez en connaître des secrets... La moindre rumeur, le moindre inavouable ouï-dire ou la moindre nébuleuse palabre prononcée à la cour, doit passer par vous? Grand-Dieu, que cela est excitant ! Voyez Monsieur le Comte, vous réveillez la médisante commère qui sommeille en moi..."

Le Duc de Boissezon rit alors de bon coeur, tout en suivant le pas imprégné par Monsieur de Chastignac dans une direction inconnue.